LES TRANSPORTS EN CORSE : DES PREVISIONS AUX RÉALITÉS
Que reste-t-il du PEI, 15 ans après ?
Le PEI a-t-il atteint ses objectifs en matière de transports ? Pour le savoir, il nous suffit de reprendre les orientations, et de les comparer aux réalisations.
LES ORIENTATIONS DU PEI – TRANSPORTS ROUTIER ET CHEMIN DE FER
Le relevé de conclusions du 20 juillet 2000 issu des discussions entre le Gouvernement et les élus Corses, retient l’engagement d’un programme exceptionnel d’investissements publics sur 15 ans.
Le diagnostic et les orientations présentés sont fondés sur les analyses partagées entre l’Etat et la CTC, retracées dans le plan de développement de la Corse actualisé par la délibération du 25 juin 1999 et les documents stratégiques du contrat de plan et du DOCUP[1] 2000-2006.
La contribution de l’Etat se montera au plus à 70% du programme, sans dépasser 80% pour une opération donnée (30% en moyenne à charge des maîtres d’ouvrages locaux.)
Ce relevé posait un certain nombre de constats et donnait quelques orientations, et objectifs, retracés sous une forme synthétique, ci-après.
LE RÉSEAU ROUTIER Montant prévu : 1126,6 M€
Les anciennes routes nationales ne constituent pas encore un réseau moderne répondant aux attentes de la population et de l’économie, malgré les investissements réalisés par la CTC depuis le transfert de compétences. La vitesse moyenne est de 60 km/h, contre 100 en Sardaigne sur des axes comparables. Le trafic de transit traverse des agglomérations sur des longueurs importantes, avec des routes qui y accèdent directement.
Le taux d’accidents est 2,2 fois plus élevé que la moyenne nationale. Au-delà du comportement des usagers, l’insécurité est liée à l’inadaptation du réseau.
Outre les routes nationales, il existe un réseau structurant de deuxième niveau, d’intérêt régional, comprenant des routes départementales. Certaines sections à flux touristique important datent de l’époque napoléonienne et ont moins de 4m de large.
Le plan de développement de la Corse, puis le schéma directeur des routes nationales adopté le 22 décembre 1995 ont retenu trois axes prioritaires : Ajaccio-Corte-Bastia (RN 193), Bastia-Bonifacio (RN 198) et Ajaccio-Bonifacio (RN 196).
Il conviendra d’achever la modernisation de l’axe Ajaccio-Bastia. Les objectifs d’amélioration du confort et du temps de parcours doivent conduire à le ramener à un temps inférieur à deux heures. En outre, il devra être possible de dépasser dans les secteurs montagneux sur plus de 20% de l’itinéraire dans chaque sens de circulation. Bien que d’un coût très élevé compte tenu des prescriptions nouvelles en matière de sécurité, le tunnel de Vizzavona permettrait un franchissement dans de bonnes conditions et une diminution du temps de parcours. Toutefois, des études préalables très précises devront être entreprises avant toute décision de réalisation.
L’axe Bastia-Bonifacio doit connaître une amélioration sensible en termes d (sécurité, garantie voire augmentation de la capacité, déviations).Quant à la liaison Ajaccio-Bonifacio, bien que son trafic soit moindre, elle doit également faire l’objet d’améliorations sensibles,
LE CHEMIN DE FER, Montant prévu : 89,18M€
Les problèmes sont multiples : temps de parcours trop long, sécurité de la voie insuffisante, matériel roulant obsolète. Il est donc peu utilisé. Les voyageurs parcourent 50 fois moins de km sur le réseau ferré que sur les routes nationales, et même au sud de Bastia, le trafic de la voie ferrée reste inférieur à 1000 voyageurs/jour quand celui de la RN 193 est de l’ordre de 30 000 véhicules/jour. La durée du voyage varie de 3 h 30 à 4 h entre Ajaccio et Bastia ( 2 H 30 à 3 h par la route. Elle est de 3 h15 Bastia et Calvi contre 1 h 35 par la route.
Le PEI doit être l’occasion de réaliser un véritable saut qualitatif. En effet bien que les moyens du contrat de plan et du DOCUP soient importants, ils ne sont pas suffisants pour rénover en profondeur l’axe Ajaccio-Corte-Bastia et améliorer la desserte de la Balagne et du sud de Bastia qui sont pourtant nécessaires tant pour la population résidente que pour la clientèle touristique.
La modernisation devra assurer la reconstitution de la plate-forme, du ballast, le traitement des passages à niveau, la mise en sécurité du réseau, notamment pour ses ouvrages d’art. Certains matériels roulants doivent être remplacés et le parc doit être développé, en particulier pour accroître la desserte péri-urbaine.
Avec 50,3 M€ pour les ports, les transports représentent 1266,08 M€ sur 1940,68 M€ du PEI.
LES RÉSULTATS
Eu regard aux objectifs, il est permis de douter des résultats.
Sur le routier, des travaux ont certes été réalisés, mais le temps du transport Ajaccio Bastia, par exemple, n’a pas été sensiblement réduit. Il est toujours de 2h 30 à 3 heures. Les créneaux de dépassement sur 20% de l’axe n’existent pas, pas plus que le tunnel de Vizzavona dont même les études n’ont pas été réalisées.
Quant au train, on connait les résultats. Malgré des investissements considérables, et le dépassement des prévisions de crédits, le temps de trajet Ajaccio Bastia est toujours de près de 4 heures, comme au début du PEI. Aucun gain n’a été réalisé en temps de trajet depuis les années 50! Et le scandale des AMG[2], digne d’une république bananière, est passé par là.
Le tout alors que le trafic routier s’est considérablement accru, avec une population résidente en augmentation de 60000 habitants et que le nombre de touristes a explosé.
Au vu des insuffisances constatées à tous points de vue, mais en particulier sur la qualité des réalisations, il est aussi permis de s’interroger sur la faiblesse de l’ingénierie ce que certains élus avaient soulevé dès le départ, sans être écoutés.
Paul MEDURIO
[1] Document Unique de Programmation
[2] Autorail Métrique Grand confort
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