Thème de la conférence : «Le retour des corses en Corse»
Lieu : Espace de culture Locu Teatrale, 8 Rue Hyacinthe Campiglia, 20090
- Coordinateur de la thématique : P Poggioli
- Secrétaire de séance : JL Rossi
- Assistance : 25 personnes
- Début de la réunion : 18h50
- Fin de la présentation du thème : 19h00
- Début des échanges avec la salle : 19h00
- Fin des échanges avec la salle : 20h30
Déroulement de la réunion
- Introduction : JL Rossi
- Présentation : J Taddei
- Parole à la salle :
- Explication du principe de la prise de parole : R Taddei
- Chairman : P Poggioli
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Échanges
Remarques :
- Une synthèse est un moyen de retranscrire les idées maitresses développées lors des échanges par les différents intervenants. Elle permet d’avoir une vue d’ensemble de la réunion publique et ne prétend pas rapporter mot à mot ce qui a été dit.
- Les noms reportés sont ceux donnés par les différents intervenants lorsque ces derniers ont bien voulu indiquer leur identité. Toutes les interventions dont les personnes n’ont pas décliné cette identité seront indiquées comme étant attribuées à l’intervenant Y.
P Poggioli : introduction aux échanges
- Maintenant que quelques éléments ont été fournis par J Taddei sur le sujet (cf. texte en fin de synthèse), il est temps que vous puissiez vous exprimer en respectant notre mode de prise de parole rappelé par R Taddei.
T Fieschi
- Il faut revenir sur la volonté réelle ou non de ce retour de la diaspora.
- Il faut également s’inspirer de ce qui est fait ou ce qui a été fait ailleurs.
- La politique du « retour » est en règle générale organisée par les États.
- L’Exemple de ce qui existe en Israël depuis 1948 avec une politique incitatrice est à regarder avec attention et nous devons nous inspirer des outils utilisés par ce pays pour faire revenir les gens.
- Le départ s’est fait pour des raisons économiques.
- Il faut donc que l’incitation au retour soit également économique.
- Il faut donc que cette incitation s’appuie sur un dynamisme économique.
- Cette impulsion doit être faite par la CTC et ne pas se baser uniquement sur la volonté individuelle.
- L’économie est la clé de ce problème !
PF Colombani
- La référence à Israël ne mène pas loin.
- Car le contexte est différent. Israël était un État en construction et aidé financièrement.
- Il faut agir sur le terrain et le plus vite possible.
- Expérience personnelle : dans d’autres îles françaises, ce sont les amicales des corses qui prenaient les nouveaux arrivants en charge.
- Il faut s’en inspirer et mettre en place un réseau d’individualités pour s’occuper des arrivants.
- En gros, disposer de correspondants.
- Ce réseau devra s’appuyer sur les amicales corses existantes de par le monde.
- Il faut être pragmatique et opérationnel sur le terrain tout de suite.
JM De Marco
- Nous devons être attractifs.
- L’exemple de https://www.communiti.corsica est à mettre en avant.
- Il faut aussi enrichir le concept de « résident » pour inciter les gens à venir.
- Le retour des corses passe par une motion politique.
PF Colombani
- Il y a une urgence car les statistiques « cachées » de 2008 montraient que 4000 personnes par an s’installent en Corse.
- Et sur ce nombre, 90 % sont des continentaux.
- 4000 arrivent donc à s’installer !
- Il faut donc trouver les moyens que les nôtres fassent partie de ces 4000 en plus grand nombre.
A Chalaris
- Il serait quand même préférable d’aider les gens qui sont ici à vivre correctement avant d’aller chercher ceux qui seraient susceptibles de revenir.
- La réalité du terrain montre que les administrations, qui sont de gros employeurs en Corse, n’ont pas de politique pour recruter des gens issus de Corse.
M Defranchi
- La première des priorités doit être de freiner l’hémorragie des départs.
- Prenons l’exemple des bacheliers : 40 % de ces derniers partent ailleurs.
- Et malgré cela, l’université Pasquale Paoli impose aux étudiants des stages en dehors de l’île.
- Ce qui engendre des coûts supplémentaires pour les familles et souvent la fuite des cerveaux qui finissent par s’installer ailleurs.
- Il faut prendre des mesures conservatoires rapidement car un natif de Corse a plus de chance de trouver un emploi ailleurs qu’ici.
- Les emplois sous-qualifiés sont pris par les nouveaux arrivants.
S Barbolosi
- Il y a aussi des jeunes qui veulent partir pour voir ce qui se fait ailleurs et ensuite revenir.
- Il y a aussi une demande des entreprises pour apprendre certaines langues.
- Il y a un intérêt certain pour le chinois.
- Le problème majeur c’est qu’il n’y a pas de réels débouchés économiques.
- La question que se posent les gens installés ailleurs est de savoir s’ils retrouveront une situation équivalente ici.
JD Rossi
- Il y a un sentiment de péril en Corse car il y a un déficit démographique criant entre les nouveaux arrivants et les locaux obligés de partir pour vivre convenablement ailleurs.
- Il ne faut cependant pas opposer la logique de la mise en place d’une politique du retour avec une politique favorisant l’emploi des personnes jeunes ou moins jeunes qui veulent rester vivre décemment sur notre Terre.
- I corsi di u cuntinentu que nous appelons ainsi et que nous voulons inciter à revenir ne sont pas toujours ceux que nous imaginons avec cette identité que nous pourrions qualifier de « Stintu paisanu ».
- En réalité, ce n’est pas une histoire d’individualité mais plutôt un problème global.
- Pragmatiquement, il serait préférable que la majorité des 4000 soit composée « d’amis »…
M Defranchi
- Qu’est-ce qui est le plus compliqué en réalité :
- Récupérer les expatriés sur plusieurs générations ?
- Faire des corses des 4000 nouveaux arrivants/an.
- Nous devons nous poser la question de savoir comment ces 4000 réussissent à rentrer et ensuite se loger.
- Comment quantifier le niveau de désir de venir vivre avec nous ?
- Ce qui est certain c’est que ce retour engendre des sacrifices évidents !
PF Colombani
- Le désir peut être provoqué.
- Les autochtones deviennent minoritaires.
- Nos enfants ont des difficulté à trouver des emplois et les non-insulaires d’origine se casent.
- Les entreprises peuvent être tentée par des personnes plus malléables.
- On doit permettre le retour de ceux qui ont faits des études supérieures à l’étranger.
- Se servir des exemples d’ailleurs où l’on aide ce retour des personnes hautement qualifiées.
- Il faut effectivement de la volonté.
P Medurio
- Aucun peuple au monde ne peut se passer de sa diaspora.
- J’ai en tête l’exemple d’un neurochirurgien de talent qui voulait s’investir en Corse et auquel on a répondu qu’il était trop diplômé.
- À côté de cela, il y a des territoires de notre île qui n’arrivent pas à trouver un médecin comme par exemple u Capi Corsu.
- Ce n’est pas un problème de faire revenir des gens qui ne parlent plus notre langue mais qui se sentent corses.
- La diaspora dispose des compétences les plus fortes et de la capacité financière la plus importante.
- Cette capacité financière pour investir est une de nos grosses faiblesses.
- C’est pour cela qu’il ne faut pas dire qu’ils ne sont pas des nôtres.
A Chalaris
- Ce qui me contrarie, c’est qu’il n’y a pas de projet pour la Corse.
- Que proposons-nous à ceux qui rentrent ?
- Le système actuel est honteux car celui qui travaille peine et celui qui « s’arrange » avec le système gagne beaucoup d’argent.
- Nous achetons tout et ne produisons pas grand chose.
- Les start-up c’est bien mais il faudra que ceux qui sont ici puissent vivre dignement en restant chez eux.
JD Rossi
- Il doit y avoir un fait patriotique qui pousse les gens à revenir.
- Ils doivent revenir pour faire un Pays.
- Ghjè una mossa !
- Une affaire politique qui doit porter ce peuple.
Synthèse intermédiaire faite par P Poggioli
- Il y a un constat qui revient souvent, celui que la diaspora actuelle n’est plus celle d’antan.
- Parmi le million de Corses qui vivent en dehors de l’Île, il faudrait arriver à en faire revenir 10 % au moins.
- La population insulaire subit des apports importants venus de l’extérieur.
- On reproche à cette population de ne pas s’intégrer, mais en réalité, on ne leur donne pas les moyens de le faire. Ils doivent s’intégrer à quoi ?
- Il est impératif de définir un projet de société !
- Il va falloir assumer aussi le retour de gens qui n’ont pas les critères de corsitude qui sont les nôtres.
- Le cas d’Israël a été évoqué. Son esprit est pionnier en la matière. Cette volonté de s’appuyer sur la diaspora pour restaurer un État.
- Est-ce le cas pour notre diaspora et également pour ceux qui sont sur place ?
- Que font concrètement nos hommes politiques ?
- Il ne faut pas basculer dans une politique élitistes car nous avons besoin de toutes les compétences, du simple manœuvre au chirurgien de talent.
- Nous devons mettre en place une politique qui recherche les compétences qui manquent localement dans tous les secteurs pour ensuite mettre en place des politiques d’aide qui soient réellement efficientes.
- Cela implique donc obligatoirement de s’appuyer sur le politique.
- Pour la suite des échanges, il serait bon d’arriver à dégager 5 ou 6 axes qui favoriseraient ce retour.
PF Colombani
- Il est nécessaire de proposer un schéma d’actions pour favoriser le retour.
- Il faut un schéma opérationnel.
- Il faut faire un travail d’investigation auprès des entreprises.
- Être des « facilitateurs ».
- Il faut arriver à mettre en contact les besoins et les personnes qui veulent revenir.
- Il faut absolument des propositions opérationnelles !
R Menasse
- Avons-nous vraiment besoin des politiques ?
- Au vu de mon expérience personnelle, je serais en droit de me poser certaines questions :
- Suis-je un corse de la diaspora car je suis parti un certain temps faire mes études ailleurs puis m’y suis installé ?
- Ou suis-je seulement un corse qui s’est momentanément absenté de son Île ?
- Donc, la question que j’ai envie de mettre en avant est celle-ci :
- De quelle manière, ensemble, nous pourrions partager une initiative qui permette de savoir si les corses d’ailleurs veulent revenir et comment doit-on s’y prendre pour les faire revenir ?
P Medurio
- Il va bien falloir s’appuyer sur la diaspora.
- Il ne faut pas les positionner en victimes mais il ne faut pas les culpabiliser non plus.
- On a besoin de leurs compétences et également de leur capacité d’investissement.
- Le monde d’aujourd’hui, réduit les distances et il est temps de prendre ce paramètre en compte.
- Nous devons être bienveillants envers ces corses partis ailleurs.
- Nous devons nous mettre dans une posture intellectuelle et créer les conditions psychologiques pour concrètement pouvoir les accueillir.
JD Rossi
- Les corses sont hospitaliers de nature.
- Il n’y pas de problème majeur pour accueillir les gens.
- Le problème n’est pas là.
- Le problème est d’organiser une offre pour faire revenir ceux qui le veulent afin d’apporter à notre peuple les compétences qu’il n’a pas localement.
T Fieschi
- Les exemples que l’on peut prendre ailleurs viennent d’États qui sont indépendants, ce qui n’est pas notre cas.
- Depuis 40 ans, nous parlons en vain de charte du retour.
- Nous ne mettons pas en face de ce besoin de faire revenir des nôtres un projet de société pour la Corse.
- Le constat est là : l’assemblée territoriale de Corse n’a jamais traité sérieusement ce problème.
- Pratiquement, il faut que la prochaine assemblée de Corse crée une administration dédiée à cette tâche.
- Il faut qu’elle identifie un projet de société qui puisse répondre à la pression démographique que l’on subit ces dernières années.
- En d’autres termes, aller au-delà de l’affichage et prendre le taureau par les cornes.
- Si seulement nous avions conscience que c’est un besoin vital pour la Corse !
- Ma conviction est que ce retour ne peut-être lié qu’à une incitation économique.
S Barbolosi
- On parle d’offres et de demandes.
- Est-ce qu’il y a du travail ici ?
- Ne va-t-on pas mettre de la concurrence en plus à des gens ici qui peinent à trouver des emplois ?
- Ne vaut-il pas mieux aider les gens qui sont ici à se caser et vivre décemment ?
- Comment mettre une agence du retour en place sans heurter l’existant déjà bien fragile ?
- Il faut que ce problème soit pris en compte au-delà des élus.
- Il faut regarder aussi du côté des initiatives du secteur privé.
PF Colombani
- Donner la gestion de ce problème à la CTC est un rêve.
- Il y a la problématique de la tutelle de l’État et les freins du droit qui rejette toutes initiatives qui pourrait inclure une notion de discrimination.
- La seule solution viable est celle de la création d’une association de type 1901 au début.
- Ensuite seulement, les instances politiques pourraient prendre en compte le problème et appuyer la démarche initiée par cette association.
- L’objectif étant de prendre exemple sur la Polynésie Française qui a un cadre lui permettant l’adaptation des lois.
- Il faut donner l’exemple.
A Chalaris
- On a parlé de la langue mais nous n’avons pas assez dit qu’elle était le lien entre les corses.
- Il ne faut pas la mettre de côté !
- Elle devrait permettre de faire en sorte que les emplois soient pris en priorité par des corsophones.
P Medurio
- Il existe déjà une association qui est Corsica Diaspora.
- C’est certain qu’il y a un espace à occuper.
- Pourquoi ne pas partir de cette association ?
N Laredo
- Effectivement, il existe une association qui a déjà travaillé sur le sujet.
- Edmond Simeoni s’y est impliqué fortement.
- Il serait donc souhaitable avant qu’une autre initiative voit le jour de prendre contact avec Corsica Diaspora et étudier comment procéder et ne pas se disperser.
JM De Marco
- Les échangent enrichissent indéniablement le débat sur le sujet.
- La question que l’on peut poser est la suivante : Est-ce qu’aujourd’hui, ces hommes et ces femmes qui composent cette majorité nationaliste ont une âme de pionniers ?
- Il doit y avoir deux démarches simultanées et en parallèle pour mener à bien ce projet.
- Une démarche institutionnelle et une autre portée par la société civile.
- Ces initiatives se nourrissant du même terreau.
Synthèse finale faite par P Poggioli
- Les idées à proposer pourraient être les suivantes :
- Mettre en place un vrai schéma d’actions.
- Envoyer ce dernier à nos élus.
- Être des « facilitateurs ».
- Déboucher sur un schéma plus large en s’appuyant sur la CTC.
- L’idéal étant de trouver une complémentarité entre initiative de la société civile et institutionnels.
- Pourquoi ne pas s’appuyer sur une association existante ?
- Après une concertation assez large, il faudra transmettre nos travaux à la future majorité de l’assemblée territoriale pour travailler en synergie.
- Il faudra mettre en parallèle les besoins locaux avec les compétences d’ailleurs sans pour cela mettre en difficulté les personnes qui sont en Corse et qui essayent d’y rester.
- Enfin, n’est-on pas en droit d’attendre des entreprises que l’on aide localement à se développer qu’elles fassent des efforts significatifs pour l’embauche de corses ?
- Il faut impérativement lier ce retour de la diaspora à un projet économique pour la Corse.
- Nous devons mettre sur la table des pistes, des préconisations.
Texte d’introduction présenté par J Taddei
Le retour des corses en Corse
Depuis les années 2000, la Corse connait un développement démographique important. La population de l’ile est aujourd’hui de 320000 habitants (INSEE). Mais cette progression démographique n’est pas due à un solde excédent du nombre des naissances par rapport au nombre des décès. Cet afflux de population résulte surtout d’un seuil migratoire excédentaire, résultat de l’installation de personnes venues de l’extérieur. Et ce alors que les Corses de par le monde ou leur descendants représentent une population autrement plus importante que celle aujourd’hui vivant et travaillant dans notre île.
Cette situation pose à terme la question de la capacité du peuple corse à intégrer les nouveaux arrivants à une culture, une langue, des valeurs, qui sont les nôtres et qui nous ont été léguées par nos parents, nos ancêtres qui ont fait leur vie et sont morts sur leur terre…
La Corse aujourd‘hui fabrique-t-elle ou fabriquera-t-elle toujours des corses, si un tel déficit naissances-décès se poursuit, et si les flux migratoires résultant de l’installation de nouveaux arrivants restent pour de longues années aussi importants ?
Comment remédier à cette situation ? Quelles solutions seraient susceptibles de modifier cette tendance inquiétante pour l’avenir du peuple corse ?
Une des pistes à explorer pour faire face à ce défi est celle du retour des corses de la diaspora dans l’île qu’ils ont quittée pour d’autres horizons et pour nombre de raisons, avec l’espoir d’y revenir un jour, ou celle de leurs descendants qui rêvent de retrouver la terre mythique de leurs ancêtres, eux qui ont vécu ailleurs et qui ne connaissent souvent l’île que par les récits et l’héritage de leurs parents aujourd’hui disparus sans avoir réalisé leur rêve de retour.
Au-delà des installations individuelles difficiles, véritables parcours du combattant de nombre de corses revenus, souvent confrontés à d’incommensurables difficultés et de désillusions, leur situation variant en fonction de leur statut social, de leur portefeuille ou de leur profession, l’heure ne serait-elle pas venue de réfléchir à une installation plus organisée et pensée de nos exilés qui le souhaitent. Le moment (politique notamment) ne serait-il pas venu de leur offrir des possibilités d’accueil et d’accompagnement, en même temps qu’un Projet collectif auquel ils participeraient et dans lequel ils s’insèreraient, en leur permettant d’affronter avec succès ce challenge du retour sur leur terre et surtout de le réussir.
Le retour des corses sur leur terre,
C‘est le thème du débat que vous propose le cercle I Chjassi di u Cumunu le jeudi 18 mai 2017, espace Locu teatrale à Aiacciu
Une réflexion sur “SYNTHÈSE : RÉUNION PUBLIQUE DU JEUDI 18 MAI 2017, AJACCIO”
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