Synthèse
Thème de la conférence : « La Corse : Un an après»
Lieu : IUT di Corti, Campus Grimaldi
- Coordinateur de la thématique : P. Poggioli
- Secrétaire de séance : J.L. Rossi
- Assistance : 14 personnes
- Début de la réunion : 18h45
- Fin de la présentation du thème : 18h55
- Début des échanges avec la salle : 18h55
- Fin des échanges avec la salle : 20h30
Déroulement de la réunion
- Introduction : S. Marchetti
- Présentation : N. Alfonsi
- Parole à la salle :
- Explication du principe de la prise de parole : I. Pasquali
- Chairman : P. Poggioli
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Échanges
Remarques :
- Une synthèse est un moyen de retranscrire les idées maitresses développées lors des échanges par les différents intervenants. Elle permet d’avoir une vue d’ensemble de la réunion publique et ne prétend pas rapporter mot à mot ce qui a été dit.
- Les noms reportés sont ceux donnés par les différents intervenants lorsque ces derniers ont bien voulu indiquer leur identité. Toutes les interventions dont les personnes n’ont pas décliné cette identité seront indiquées comme étant attribuées à l’intervenant Y.
P. Poggioli : introduction aux échanges
- Maintenant que quelques éléments ont été fournis par N. Alfonsi sur le sujet, il est temps que vous puissiez vous exprimer en respectant notre mode de prise de parole rappelé par I. Pasquali.
- Pour permettre de structurer les échanges, nous proposons de scinder la suite de la réunion en deux parties :
- Première partie: Le bilan de cette nouvelle majorité lors de cette courte mandature
- Seconde partie: Les attentes
Première partie : Le bilan de cette nouvelle majorité lors de cette courte mandature
P.F. Nasica
- En préambule, une remarque : lors de mes déplacements et en particulier au Pays Basque, j’ai pu constater que les échanges se faisaient en utilisant la langue du lieu et que des systèmes de traduction simultanée étaient systématiquement mis à la disposition de ceux qui ne maîtrisaient pas cette dernière. Ici, les gens commencent souvent à parler en langue corse puis s’arrêtent et basculent en langue française sous prétexte « que tout le monde puisse comprendre ». Pourquoi ne pas adopter ce qui marche ailleurs ?
- Pour ce qui est du bilan, une communication plus large et plus pédagogique est attendue car actuellement, on se perd un peu !
- Sont-ils assez nombreux pour prendre en charge tout ce qu’il y a à faire car, pour la plupart, ils cumulent mandats et fonctions.
- En réalité, il faudrait un plan du type « Orsec » !
- Donc, on ne comprend pas trop les visées de cette majorité pour l’instant et il faudrait plus d’explications comme le faisait par exemple une personnalité comme Y. Stella lorsqu’il était élu et qu’il s’arrêtait discuter directement avec nous à la faculté après chaque séance.
- Un point positif est sans nul doute la présidence de G. Simeoni à la tête de la Commission des îles européennes alors qu’on n’en entendait plus parler depuis la présidence de J. Baggioni.
R. Micheli
- Un commentaire sur les îles européennes : La CCI régionale s’intéresse et s’investit depuis 2015 pour formaliser effectivement des rapports avec les îles européennes.
- En réalité, les professionnels ne s’occupaient pas de cette problématique avant cela.
P. Poggioli
- La présidence de J. Baggioni n’a servi à rien car il ne s’en est pas occupé.
- À l’époque, il y avait une politique assez bizarre de l’Assemblée de Corse.
- Dans les années 80, il n’y avait pas un réel intérêt pour développer des relations avec les autres îles.
- Après la victoire de Mitterrand en 81, ce fut vu par les élus locaux comme un moyen pour contourner Paris et traiter directement avec l’Europe.
- Un moyen d’aller chercher des financements pour consolider le clientélisme localement.
- Actuellement, la présidence est une chance et est un bien pour la Corse.
P.F. Nasica
- L’exemple d’un projet pédagogique mené avec des collégiens et lycéens de Corte nous est expliqué.
- Ce projet porte sur la problématique des déchets et l’un de ses objectifs est d’aller à la rencontre des solutions efficientes, mises en place ailleurs, pour ensuite le comparer à ce qui est fait ici.
M. Simeoni
- Par le passé, la solidarité nationale était mise en avant.
- Ensuite, les politiques locaux ont compris ce que pouvait représenter la manne financière (fonds européens) des programmes comme INTERREG.
- Le problème qu’a rencontré J. Baggioni réside dans le fait qu’il a été élu, à l’époque, sur une liste française, défendant des intérêts divergents des intérêts corses puisque suivant la politique française.
- Il avançait donc sans force sur les sujets et problématiques des îles.
- Aujourd’hui, sont-ils plus en capacité de faire évoluer positivement les choses ?
- Ce qui est certain, c’est qu’il est impossible de quantifier le « manque à gagner » de toutes ces années de léthargie de nos représentants.
P.F. Nasica
- Un autre exemple est porté à la connaissance des personnes présentes : une société insulaire qui avait pour objectif de « monter » des dossiers pour « capter » des fonds européens sur des projets bien précis.
- Société qui traitait directement avec l’Europe et qui n’existe plus.
- Cette société travaillait avec des pays qui avaient des besoins identiques.
- Pour la Corse, les dossiers étaient… perdus et donc ne donnaient jamais de suites favorables à des projets qui auraient pu être bénéfiques pour nous.
- Résultat : la Corse n’a jamais fait partie de ces programmes car apparemment, localement, il n’y avait pas un intérêt majeur à associer la Corse à une telle démarche.
R. Micheli
- La prise de parole étant exclusivement masculine jusqu’à présent, R. Micheli signale qu’au sein du cercle I Chjassi di u Cumunu nous pensons que les femmes doivent prendre plus souvent la parole, car leur point de vue est aussi important que celui des hommes qui occupent trop souvent l’espace médiatique et politique.
P. Poggioli
- La plupart du temps, les fonds européens ont permis d’asseoir une clientèle.
- De plus, dans ce système mis en place, les entreprises locales ne pouvant pas apporter leur part financière, cela a eu comme conséquence de voir souvent les fonds repartir sans être utilisés.
- Ces crédits non consommés ont donc pénalisé notre développement.
- Quand les nationalistes ont fait la demande qu’un bureau de l’Assemblée de Corse soit ouvert dans les locaux des instances européennes, cette proposition fut toujours refusée par la majorité en place à l’époque.
M. Simeoni
- L’internationalisation du problème corse a été tentée à une époque, car nous étions bloqués localement.
- Les liens avec l’ALE ont nécessité une démarche de longue haleine et ont demandé beaucoup d’efforts.
- À l’époque où les flamands étaient au cœur du dispositif cela a permis de faire venir des conférenciers pour sensibiliser l’opinion.
- Il faut se rappeler qu’à l’époque Edmond Simeoni a fait une conférence dans l’enceinte du Parlement européen à Strasbourg (invité par les flamands en 1980) et que Simone Veil, alors présidente du parlement européen (1979-1982), tenta d’annuler cette intervention. Cette dernière eut finalement lieu car les flamands firent entrer Edmond Simeoni par une porte dérobée.
- Pour l’action de J. Baggioni, il faut dire qu’il n’a pas pu faire grand chose !
A. Chalaris
- Les propos tenus jusqu’à présent me contrarient car je ne fais pas confiance à l’Europe.
- La question que l’on doit se poser est : « Un développement pour en faire quoi et pour qui ? »
- L’exemple de la prime à la vache est symptomatique : l’Europe a donné de l’argent pour garder des vaches qui ne servent à rien et qui ne produisent rien dans la plupart des cas. Le cheptel bovin a été ainsi favorisé alors que, par le passé, il n’y avait que très peu de vaches dans nos montagnes. De plus, le besoin est plutôt sur les cheptels caprin ou ovin qui eux sont moins « aidés ».
- La démarche actuelle de se rapprocher des îles a un sens.
M. Simeoni
- La problématique de la prime à la vache doit être appréhendée dans sa globalité.
- Initialement, elle a été mise en place par l’Europe pour diminuer la production laitière en favorisant la production de viande.
- Elle a donc été conçue pour les pays où cela a un sens.
- Le fait est, qu’ici aussi nous en avons eu…
- À l’époque, la situation n’était pas bonne pour le monde agricole car le monopole de l’entreprise Roquefort® prenait les bergers à la gorge. Cette entreprise dirigeait alors tout et ne pensait pas aux bergers.
- Cette prime a malheureusement permis localement de la spéculation, des dérives.
- Cependant, l’Europe a réagi en envoyant des contrôleurs et en suspendant les versements de la prime.
- L’État français l’a rétablie !
- Le problème est donc un problème dû à l’État français qui laisse faire, car on ne dispose pas de structures ici qui peuvent traiter avec l’Europe directement.
- Ce sont les politiques qui impulsent !
S. Marchetti
- Je n’ai personnellement pas de doute vis-à-vis de l’Europe.
- Par contre, un doute existe vis-à-vis de ceux qui la servent.
- Pour revenir sur la courte mandature de cette nouvelle majorité à la CTC, nous pouvons noter la mise en avant de sujets généraux traitant de la langue, de la montagne…
- Pour ce qui concerne les problèmes du quotidien, il y a apparemment moins de latitude pour agir.
- La collectivité unique sera-t-elle une solution ?
- Il y a aussi des dettes abyssales qui ne permettent pas à la Corse de traiter son quotidien convenablement.
- La présidence de G. Simeoni à la tête de la Commission des îles européennes est une bonne chose.
- Une question que nous pouvons nous poser est celle de savoir ce que nous avons réellement en commun avec ces îliens ? Ne sommes-nous pas plus proches à l’heure actuelle des habitants de Francfort ou Berlin ? Dans la vision globale que nous offre la mondialisation, d’où en découle l’uniformisation des modes de vie.
M. Simeoni
- L’Europe est intéressante car elle permet l’expression des minorités malmenées.
- Cela a comme conséquence de diminuer le pouvoir de l’État-nation.
- Il n’y a pas pire que l’État français, car nous sommes actuellement dans une situation de forte dépendance.
- Nous sommes dans l’obligation de « mendier » tout en maintenant les difficultés qui existent.
- La solution réside donc dans l’obtention du pouvoir tout en sachant ce que l’on veut en faire.
- Il faut structurer l’économie et ne pas attendre tout des aides.
- Trop de projets n’ont pas d’impact positif sur l’économie.
Intervenant Y
- À Malte, ils boivent du vin avec du coca-cola® mais savent ce qu’ils sont.
- Ici, nous sommes universalisés alors qu’eux ont des racines.
- L’exemple de la jeunesse des îles de Méditerranée est aussi un moyen pour la jeunesse corse de se projeter et de voir comment ailleurs on vit sa modernité.
- Pour avoir vécu en Allemagne, je peux dire que nous n’avons rien à voir avec eux.
- La présidence de G. Simeoni à la tête de la Commission des îles européennes est un symbole plus qu’autre chose, mais il faut savoir s’en servir.
A.M. Campocasso
- On peut déplorer un manque de communication de la part de la nouvelle majorité à l’Assemblée de Corse.
- Nous avons des problématiques communes avec les autres îles.
- Sur le plan culturel, nos problèmes sont plus importants car nous avons été plus brimés.
- Quand on n’a pas connu quelque chose, il est très difficile de se le réapproprier.
- Par exemple, mes parents ne m’ont pas transmis le corse et je suis incapable de le parler correctement.
- La CTC a tellement d’autres problèmes à traiter dans l’urgence !
R. Micheli
- En fait, il y a deux Europe : celle du continent et celle des îles.
- Ces deux Europe sont à deux vitesses.
- La CTC ne peut pas faire de miracles.
- Sur un budget d’environ 700 millions/an, près de 200 millions sont dédiés à la continuité territoriale, près de 300 millions sont fléchés pour le fonctionnement et il reste donc dans les 180 millions pour investir (PEI, fonds FEDER, économies de la CTC).
- Le résultat est donc que la Corse ne peut pas avancer l’argent, car nous n’avons pas assez de fonds propres.
- Un constat : les deux collectivités qui sont actuellement bien gérées sont le CG 2A et la CCI 2B.
P.F. Nasica
- Le problème des dettes antérieures pénalise fortement notre avenir.
- Espérons que les emprunts effectués par cette nouvelle mandature permettront de desserrer l’étau.
A. Chalaris
- La langue est un lien entre des individus d’un même peuple.
- Sur le sujet, il y a encore beaucoup de choses à faire par la CTC.
- Si on ne tient pas assez compte de la langue, on va au devant de gros problèmes.
- La langue est souvent utilisée comme une excuse.
Synthèse de la partie 1 par P. Poggioli :
- Lors de cette réunion, les propos tenus sont différents de ceux des réunions d’Aiacciu et de Bastia sur le même thème : l’Europe a été au cœur des prises de parole.
- On est également revenu au problème culturel de la langue.
- Le constat que pour aller vers quelque chose, il est nécessaire de connaître d’où l’on vient a été mis en avant.
- Un autre constat plus problématique a été fait : nous sommes acculturés.
- Il a été dit qu’il fallait renforcer la langue, la culture et avoir des projets économiques.
- Il faut faire des choix.
- Nous n’avons pas trop abordé la problématique des relations entre la Corse et l’État français.
- Depuis quelques mois, il y a trop de communication sur les réseaux sociaux et peut-être pas assez avec d’autres moyens plus « classiques ». C’est un problème que doivent prendre en compte les élus.
Seconde partie : Les attentes
C. Martelli
- Depuis un an à la tête d’un bureau d’études en énergétique, j’ai pu constater les difficultés rencontrées par les personnes comme moi dans l’accompagnement et l’aide à la création d’entreprise.
- Après avoir pris contact avec les services de l’ADEC, nous avons vu qu’il n’y avait rien pour soutenir la création d’entreprise comme la nôtre (nous sommes deux).
- Même si notre choix est un choix de vie mûrit et assumé, je ne conseillerai pas à un jeune de se lancer dans ce type d’aventure tant les embûches sont nombreuses.
- Néanmoins, nous avons bien démarré et nous commençons à en vivre.
- Nous ne nous plaignions pas, car nous pensons n’être qu’à 60 % de la capacité de l’entreprise.
N. Alfonsi
- Je confirme que les institutionnels n’ont pas encore trouvé les moyens de fournir aux jeunes entrepreneurs ayant nos profils une aide efficiente.
- Nous sommes dans l’obligation de nous débrouiller par nous-même.
- C’est dommage car nos secteurs d’activités sont des secteurs d’avenir.
R. Micheli
- Une aide efficace est une aide générale et simple et surtout pas sectorisée.
- Actuellement, les procédures engendrent beaucoup de découragement et sont de véritables casse-têtes pour les demandeurs.
- Cependant, s’ils ont fait les démarches, c’est que ces demandeurs avaient des besoins.
- Il n’y a donc pas de main tendue pour ces jeunes avec ce profil.
- Le président de la Cour de Cassation et le vice-président du Conseil d’État ont dit qu’il fallait simplifier tous les codes pour plus d’efficacité. Il faut simplifier les procédures !
A. Chalaris
- Les contacts avec ceux qui dirigent la Corse existent-ils ?
J.F. Nasica
- Trop souvent la réponse à une sollicitation de la part d’un d’entre nous est : « Vois avec ma secrétaire ».
- Réponse inacceptable.
R. Micheli
- Retour sur une action du cercle qui a été échaudé par une « fuite malencontreuse » dans la presse d’un document de travail non finalisé lors d’une étude sur les comptes passés d’un Office dont le président avait répondu très rapidement favorablement à notre demande.
Intervenant Y
- Le fait de voir ce document « fuiter » ainsi, laisse assez perplexe et peut même être ressenti comme inquiétant.
- En effet, ce rapport portait sur la mandature précédente et il n’y avait rien de très problématique dans son contenu.
- Le nationalisme victorieux ne serait-il pas la mort du nationalisme ?
- Cette course effrénée à la victoire ne va-t-elle pas engendrer plus de désagréments pour notre peuple qu’autre chose ?
M. Simeoni
- Ce qui est constaté dans l’analyse des chiffres, ou dans l’expérience, n’est pas dû au hasard.
- La situation de la Corse ne peut produire que cela.
- Ma conviction profonde est que l’on ne changera pas les choses si on reste dans ce système.
- L’exemple des langues minoritaires est là pour appuyer mes propos :
- La France a fini par dire au bout de 9 ans : « on ne s’oppose pas ».
- La co-officialité est le minimum pour espérer sauver la langue car notre langue est classée parmi les langues en voie de disparition.
- Le bilinguisme ne suffira pas, l’école ne suffit pas à sauver une langue car nous ne sommes pas assez nombreux.
J.L. Rossi
- Si nous voulons avoir une politique plus efficiente alors nous devons transformer la structure actuelle.
- Mettons en place une structure vraiment voisine de celle d’un « guvernu ».
- Plus d’Offices mais des administrations sous la direction d’un membre de l’exécutif au service d’un aménagement du territoire décidé en commun.
Synthèse de la partie 2 par P. Poggioli :
- Lorsque deux jeunes entrepreneurs se sont exprimés, nous avons pu constater qu’il y avait des choses à faire pour être plus efficace et ainsi répondre plus rapidement institutionnellement à leurs attentes.
- Il y a beaucoup d’initiatives à aider.
- Le contact ou plutôt le manque de contact avec les représentants a été soulevé.
- Un rapport plus direct avec eux est souhaité.
- La langue doit être une priorité et vue comme le liant de notre communauté.
- Comment trouver les moyens de renforcer notre société, notre peuple ?
- Les élus doivent s’y pencher et dégager des pistes.
- Il faut également structurer les mouvements car on ne peut pas se contenter d’être une simple boîte aux lettres.
- Les Offices posent problème :
- Ne faut-il pas les regrouper ?
- Cette revendication est ancienne car les problèmes multiples de la non-uniformisation sont criants.
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